Israël doit-il encore croire l’Allemagne?

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Foto Olivier Fitoussi/POOL/Flash90
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Les dirigeants et visiteurs politiques allemands en Israël font régulièrement des déclarations adressées à Israël, disant qu’une solution à deux Etats est la bonne façon pour mettre un terme au conflit Palestino-israélien. L’ancien dirigeant socialiste et ministre des Affaires étrangères, Sigmar Gabriel est l’un de ces récidivistes parmi tant d’autres, en plus d’être un incitateur anti-israélien extrémiste.

 

Par Manfred Gerstenfeld

Le message en filigrane assez peu explicite de ces déclarations germanique est le suivant : Le génocide des Juifs  durant la génération de nos grands-parents est, certes, une horrible partie de notre passé. L’Allemagne contemporaine est une vibrante démocratie qui a su tirer les nécessaires leçons de son histoire. Nous sommes dorénavant une nation puissante sur la map-monde. Nous sommes donc tout-à-fait habilités pour vous dire comment vous devriez vous comporter envers les Palestiniens.

Déjà, alors que je n’étais qu’un petit garçon, un gouvernement allemand démocratiquement élu avait une ligne politique me concernant. Dans la première moitié des années 1940, au cours de l’occupation allemande des Pays-Bas, je vivais caché dans la clandestinité. Si les occupants m’avaient découvert, ils avaient deux options. Ils auraient pu, soit m’envoyer à Sobibor pour y être gazé, soit à Birkenau, où le même sort m’attendait. Après cela, on aurait brûlé mon corps avec ceux de nombreux autres Juifs et je n’aurais pas eu droit à une tombe individuelle. Les gouvernements démocratiques allemands d’après-guerre ont justement reconnu être les successeurs légaux du gouvernement nazi démocratiquement élu.

La population de l’Allemagne est très loin d’avoir complètement digéré l’horrible histoire de la génération de ses grands-parents. Cela signifie que ses autorités seraient bien inspirées de s’abstenir de s’ingérer dans des recommandations censées me concerner. La raison principale pour cela vient juste d’être mentionnée. Pourtant, il y en a beaucoup d’autres. En effet,beaucoup d’Allemands ont, de nos jours, des attitudes radicalement différentes de la majorité de la génération de leurs grands-parents. Il y en a aussi une petite minorité qui s’identifie encore aux politiques menées par le régime nazi de l’époque.

Pourtant c’est un autre énorme groupe qui constitue la cause la plus importante. Avec eux, les visions diaboliques concernant les Juifs, partagées par la génération de leurs grands-parents, se sont transformées dans une perception assez similaire d’Israël comme Etat des Juifs. Au cours de la période entre 2004 et 2014, sept sondages représentatifs ont été entrepris à ce sujet. On a demandé aux Allemands s’ils étaient d’accord avec des propositions tels que : “Israël mène une guerre d’extermination contre les Palestiniens”, ou “Israël agit envers les Palestiniens comme les Nazis agissaient envers les Juifs”.

Un sondage conduit par la Fondation Bertelsmann en 2013 avait démontré un accord de 41% parmi la population avec cette assertion. En 2007, cette configuration se portait à 30%. Les statistiques de 2013 équivalent à plus de 25 millions d’adultes allemands qui pensent qu’Israël se comporte comme les Nazis dès qu’il s’agit du traitement des Palestiniens.

Dans la vision du monde occidentale d’aujourd’hui, se comporter comme les Nazis représente le Mal absolu. Ainsi en va t-il aussi de supposées intentions génocidaires. La propagation de cette adhésion allemande à de telles déclarations à propos d’Israël révèle aussi que de vastes segments de la population n’a rien compris à l’essence même de l’histoire criminelle de leur propre pays. En outre, cela illustre à quel point de vastes segments des médias et journalistes faiseurs d’opinion en Allemagne sont moralement corrompus de façon magistrale. Ce sont eux qui ont créé l’atmosphère propice à de telles chimères.

Cette fois-ci, cependant, ce ne sont pas des journaux nazis comme Der Stuermer de Julius Streicher ou le Voelkische Beobachter du NSDAP, le Parti National-Socialiste des Travailleurs. De nos jours, l’essentiel de l’incitation provient d’une grande disparité de médias germanique supposément “progressistes”. Dans le cadre ci-dessus, peu importe si la diabolisation est provoquée par l’extrême-droite ou des “progressistes” pervers.

Il y a d’autres raisons pour lesquelles des hommes politiques allemands ne devraient pas chercher à dicter à Israël comment résoudre son propre conflit avec une autre entité. L’Allemagne démocratique s’est montrée totalement incapable d’éradiquer ou de réprimer l’antisémitisme. La chancelière Angela Merkel n’a de cesse de dire à quel point elle a honte de cela. Une réaction normale devrait être la suivante : résolvez donc vos propres problèmes d’abord et ainsi vous n’aurez pas à avoir honte de votre pays.

Mais pire que cela, dans une société où elle n’est pas en mesure d’éradiquer l’antisémitisme, la Chancelière Merkel a accueilli à bras ouverts plus d’un millions d’immigrés et réfugiés. La plupart d’entre eux proviennent des pays les plus antisémites dans le monde. En définitive, même Merkel a dû finir par avouer qu’au-delà de l’antisémitisme local propre à l’Allemagne, l’antisémitisme importé par les immigrés musulmans est venu s’ajouter au mélange de haine des Juifs propre à ce pays.

Il y a bien d’autres raisons pour lesquelles les Allemands seraient bien avisés de garder le silence sur ce qu’Israël devrait faire ou pas. Il n’y a pas d’autre pays mieux outillé pour comprendre et reconnaître que dans la société palestinienne, de vastes parties de la population ont des perceptions que ne sont que des mutations de ce que pensaient exactement les nombreux criminels et dirigeants de la génération de leurs grands-parents. Au cours des seules élections parlementaires palestiniennes – celles de 2006 – le mouvement génocidaire palestinien a obtenu la majorité absolue (66%). Quoi qu’il en soit le gouvernement allemand  a autorisé un autre mouvement génocidaire, le Hezbollah  à opérer librement sur son territoire. Ceci est approuvé par tous les partis politiques, excepté par l’AfD populiste.

Issue d’Allemagne, au cours d’une partie du siècle précédent, a surgi une quantité astronomique de haine meurtrière que devrait suffire à n’importe quel pays durant plus d’un millénaire. Les Allemands sont donc les mieux outillés pour reconnaître une haine identique provenant de nombreuses sources palestiniennes. Cela vaut aussi pour l’Iran, régime tyrannique avec lequel l’Allemagne se montre bien trop amical.

Cela provient aussi de nombreux segments du monde musulman et comprend aussi bien certains Musulmans de l’Union Européenne et d’ailleurs en Occident. L’Autorité Palestinienne récompense financièrement les meurtriers de Juifs et/ou leurs familles. Ce n’est guère différent des Allemands qui récompensaient des civils qui trahissaient et vendaient les Juifs de façons à ce que les Allemands puissent les assassiner.

Puisque les Allemands ne m’ont pas découvert quand j’étais un enfant caché, j’ai considéré ma vie comme un bonus. J’ai produit un effort pour tirer partie des leçons à appliquer dans la vie de ces circonstances heureuses issues d’un environnement frappé par le malheur. Ces enseignements comprennent la vigilance particulière à suivre attentivement tous les développements en Allemagne. On peut y ajouter sa participation à voter contre Israël aux Nations Unies. Danny Danon, l’Ambassadeur israélien aux Nations-Unies, a souligné qu’Israël représente 0, 1% de la population mondiale, mais subit 78% des condamnations de l’ONU.Un autre enseignement consiste à observer l’hypocrisie profonde de vastes parties de l’Allemagne contemporaine et de son gouvernement.

Dr. Manfred Gerstenfeld a présidé pendant 12 ans le Conseil d’Administration du Centre des Affaires Publiques de Jérusalem (2000-2012). Il a publié plus de 20 ouvrages. Plusieurs d’entre eux traitent d’anti-israélisme et d’antisémitisme. Adaptation: Marc Brzustowski. Première publication par Jforum.fr