L’Internationale Socialiste doit suspendre le parti travailliste

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Treffen der Sozialistischen Internationale auf der 140. Versammlung der Interparlamentarischen Union. Foto Socialistinternational.org
Treffen der Sozialistischen Internationale auf der 140. Versammlung der Interparlamentarischen Union. Foto Socialistinternational.org
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L’Internationale Socialiste (IS) est l’organisation mondiale des partis socio-démocrates, socialistes et travaillistes. Elle rassemble actuellement 147 partis et organisations politiques de tous les continents. Vingt-huit partis-membres sont des composantes de gouvernements. Le Parti Travailliste est observateur des décisions prises. Le principal message de l’IS est d’être en faveur des politiques progressistes visant un monde meilleur.

 

Par Manfred Gerstenfeld

Depuis plus de trois ans, une information croissante, à propos de l’antisémitisme qui se propage au sein du parti travailliste, s’est diffusée à travers le monde. Ce parti est dirigé par Jeremy Corbyn, qui éprouve une empathie sans bornes pour les terroristes, et qui n’a pas hésité à appeler des meurtriers génocidaires comme étant ses “frères” et ses “amis”. Les dirigeants et responsables de cette organisation n’auraient aucune crédibilité s’ils feignaient l’ignorance concernant la propagation de l’antisémitisme au sein du parti travailliste. D’autant plus que les bureau de l’Internationale Socialiste se situent à Londres.

Alan Johnson est ancien professeur de théorie et pratiques Démocratiques et il est lui-même membre du Parti Travailliste. Il a récemment publié un rapport de 135 pages qui conclut que le parti travailliste est institutionnellement antisémite. Son titre l’indique clairement : “L’Antisémitisme au sein de la Gauche contemporaine Institutionnellement Antisémite et la crise au sein du Parti Travailliste Britannique”.

Les principaux arguments de Johnson pour démontrer pourquoi l’antisémitisme au sein du parti travailliste est d’ordre institutionnel sont accablants pour le parti. Les nombreux cas qu’il mentionne pour donner corps à ses affirmations comprennent des exemples où le Parti travailliste ne parvient même pas à préserver ses propres membres Juifs. Il n’est pas, non plus capable de comprendre ni d’éprouver la moindre empathie pour l’expérience juive bimillénaire.

Le parti travailliste ne traite effectivement pas la question de l’antisémitisme, mais, au contraire, prend ouvertement des décisions dégoulinantes de tolérance à l’égard des cas de débordement individuels. Le parti n’est pas, non plus, en mesure d’inculquer à ses membres des repères en matière d’antisémitisme. De plus, Johnson déclare que le parti travailliste n’a pas mis fin à la culture du déni d’antisémitisme et de pratiques d’accusation de la victime.

Le Mouvement Travailliste Juif (MTJ), qui appartient depuis de nombreuses années au Parti Travailliste, a vote, ce mois-ci, une motion de défiance envers le dirigeant du parti Corbyn, quant à sa gestion des plaintes pour antisémitisme. L’ancien Premier Ministre britannique, au nom du parti travailliste, Gordon Brown, qui n’est pas Juif, s’est joint au MTJ en tant que membre de plein droit, afin de protester contre l’antisémitisme au sein de son propre parti.

Un peu plus tôt déjà, le MTJ a déféré le parti travailliste devant la Commission Britannique pour l’Egalité et les Droits de l’homme (EHRC), qui est un organisme public. L’EHRC a publié que le parti travailliste a pratiqué “ une discrimination illégale contre des personnes en raison de leur ethnicité et de leurs croyances religieuses”. Elle doit encore décider d’une enquête complète et approfondie. Depuis lors, des informations supplémentaires ont été mises à disposition quant à l’inaction des cercles dirigeants du parti travailliste, alors qu’ils devraient traiter des centaines de plaintes contre l’antisémitisme.

L’IS dispose d’une charte éthique. Elle comprend un engagement total envers les valeurs d’égalité et de solidarité. Les membres de l’IS entreprennent solennellement à respecter, défendre et promouvoir ces valeurs dans l’esprit des déclarations fondamentales et des campagnes de l’IS. Il serait absurde que les cercles dirigeants de cette organisation mondiale prétendent que les nombreuses fois où le parti travailliste ferme les yeux sur les remarques extrêmes d’antisémitisme, faites par divers responsables élus correspondent aux valeurs affichées par l’IS.

Dans sa charte éthique, l’IS affirme aussi respecter la défense de la démocratie pluraliste, qui implique, entre autres, le respect des droits des minorités et des individus. Au cours des rassemblements du parti travailliste, certains députés juifs doivent apparaître accompagnés par leurs gardes du corps. Ce fait a été révélé de façon massive dans les médias.  Une telle protection  s’est avérée nécessaire, en tenant compte des milliers de mails de haine qu’ils ont reçus. Si le conseil de Présidence de l’IS considère que respecter les droits individuels au sein du Parti Travailliste comprend le fait d’autoriser  une telle réalité, qui requiert la protection de gardes du corps pour pouvoir assister à certaines réunions du parti travailliste, l’IS doit le faire savoir explicitement.

Le parti travailliste n’a pas répondu aux attaques verbales extrêmement violentes proférées contre des individualités juives. C’est totalement contraire à un autre paragraphe de la charte éthique de l’IS, qui déclare que, quelques soient les circonstances, le respect de la dignité humaine doit être garantie. Il est aussi déclaré dans le cadre de la charte éthique de l’IS, la lute contre toutes les formes de discrimination, y compris selon l’origine ethnique et religieuse. De plus, la charte affirme que les membres de l’IS combattront les tendances racistes.

Le Comité éthique de l’IS est en charge d’observer et de superviser le code de conduit suivi par tous les partis membres. Il dispose des prérogatives de formuler des recommandations, voire même des propositions de sanctions en direction des organes dirigeants de l’Internationale Socialiste. Il est raisonnable de supposer qu’il n’existe pas de dérogations sur l’éthique de l’IS au profit des partis, qui ne sont pas membres, mais seulement observateurs de ces instances, comme l’est le parti travailliste.

L’actuel président de l’IS, depuis 2006, est l’ancien Premier Ministre grec Papandreou. C’est l’ancien dirigeant du Parti Socialiste grec, le Pasok. Ce parti porte une énorme responsabilité dans le désastre financier du pays. Son influence a subi un déclin subit à cause de cela. De nos jours, sa petite parcelle de représentativité se situe dans l’opposition, avec 19 des 300 sièges de Parlementaires.

Papandreou n’est pas soupçonné d’antisémitisme. Pourtant, au sein de son parti, on a assisté à des cas extrêmes d’expression de ce genre. Son père, Andreas Papandreou, a accusé Israël de pratiques nazies, alors qu’il était premier ministre et dirigeant du Pasok.

L’IS dispose de deux membres israéliens : le parti travailliste et le Meretz. Le dirigeant sortant du parti travailliste, Avi Gabbay, a coupé les ponts avec Corbyn et de son bureau, à cause du traitement indigent de la question de l’antisémitisme par le parti travailliste britannique. Il appartiendrait aux membres israéliens de l’Internationale d’exiger une enquête de la part de l’IS au sein du parti travailliste britannique. Durant cette période, le statut observateur du parti travailliste mériterait d’être suspendu.

Dr. Manfred Gerstenfeld a présidé pendant 12 ans le Conseil d’Administration du Centre des Affaires Publiques de Jérusalem (2000-2012). Il a publié plus de 20 ouvrages. Plusieurs d’entre eux traitent d’anti-israélisme et d’antisémitisme. Adaptation: Marc Brzustowski. Première publication par Jforum.fr